lundi 1 août 2011

Ode à un Misanthrope

"Le soleil noir se lève" - Death in June and Boyd Rice (Alarm Agents)

Pour toi le décret a été rendu, ton visage ne pâlit pas mais par révolte, tu lances tes blasphèmes. Tu n'as que faire de la pitié des hommes, tu as resserré le noeud de ta dureté; la substance de ta propre existence. Tes lèvres laissent échapper des souffles toxiques; un froissement de silence dans le refuge des profanes et des expiés.
Tu t'enorgueillis de tes écorchures sauf que l'être humain, dans sa simplicité, t'inspire un dégoût qui t'accable d'amertumes. Quelques bruissements te font tressaillir toutefois: l'écho des jours perdus, seuls des paysages monotones peuvent encore te réconforter. Tu observes le cortège des misérables pour railler l'hypocrisie des mondes car au fond tu exiges l'honnêteté du vice même chez les affables.
Sur tes paumes se dessinent avec le temps des plaies tracées par le poignard comme si elles pouvaient conjurer ton intrinsèque bienveillance. Sur ta face des traits grossiers soulignent des tourments haineux qui chassent les bonheurs défunts, legs d'une vie antérieure. Ton tombeau est la fosse de l'humanité, le diadème de ton ultime projet. Tu restes le fer de lance d'une entreprise post-mortem.

Pourtant, il y a chez toi ce désir d'immortalité quand ta plume inscrit des mots évoquant de glauques pensées. Une raison furieuse obstine ton esprit à se cloîtrer en compagnie de ces ouvrages écris aujourd'hui par des morts. Fou de Nécromancien, en lisant ces oeuvres et en pérennisant les idées de leurs auteurs tu te fais le digne héritier des Rois philosophes.
Tu extorques des téméraires leur enthousiasme, les silhouettes tordues des princes déchus déclinent toujours plus sous tes regards austères. Le dédain des femmes à ton égard t'oblige à les imaginer trainées dans la fange de leur bêtise. Tu refuses heureusement d'incarner la victime de telles duplicités préférant la langueur du lyrisme qui appartient à tes amours passées.
Tu portes les marques du sacrilège, tes paroles vertigineuses et pleines de stupres assassinent les dévots, idolâtres de la bienséance. Toi, destructeur des passions stériles qui naissent chez ceux pour qui l'amour n'est que le simulacre de leurs idéaux enfantins: dans tes veines coule le sang de Caïen, le fléau affligé de la race des hommes et ennemi éternel des sociétés asservies.


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